épisode 2 : du Sud-Ouest à Berlin, la campagne hivernale du Corps franc Pommiès et les batailles de Stuttgart et de Berlin



Mon père a dix-neuf ans lorsqu'il s'engage dans le Corps franc Pommiès. Cette unité de combat est composée de volontaires issus pour la majorité du Sud-Ouest. Elle a été créée en 1942 par le capitaine André Pommiès, dit "le Bordelais" dans la résistance.
Le chasseur Jean-Marc Saubadine participe aux coups de main et aux embuscades contre l'armée allemande d'occupation dans le cadre de l'insurrection générale ordonnée depuis Londres. De septembre 1944 à février 1945, il prend part à la libération d'Autun, en Bourgogne, et aux batailles des Vosges et d'Alsace.


Jean-Marc Saubadine engagé à 19 ans le 22 juillet 1944 -
n° d'incorporation 3910. "J'avais soif de me battre, ils l'ont transformée en soif de combattre"


Les combats dans l'Est de la France   

Après avoir traversé la France, le CFP rejoint l'armée du général de Lattre de Tassigny à Autun et prend part aux combats pour la libération de la ville, du 7 au 9 septembre 1944. Les trois jours de combat sont meurtriers avec plus d'une centaine de morts parmi les soldats français. Le régiment Valmy, lancé à corps perdu contre plusieurs milliers de militaires allemands bien retranchés et solidement armés, échoue dans le premier assaut.
L'attaque décisive se fait alors avec le renfort des combattants du Corps franc Pommiès, des survivants du régiment Valmy, d'unités de maquisards et du support des blindés du lieutenant-colonel Demetz. Le 10 septembre, l'artillerie et les blindés forcent la dernière colonne allemande d'environ 3 000 hommes à se rendre.


Libération d'Autun : la pause et la pose. Mon père est accroupi au 2e rang à gauche (croix marquée au stylo sur l'épaule). Trois autres Bayonnais (debout marqués d'une croix au-dessus de la tête et accroupi marqué au poignet) figurent sur le cliché : Camille Dumogué, Pierrot Dabancaze, nom indéchiffrable. Manque : Robert Padrones
     
Le 22 septembre, les fantassins du CFP sont intégrés dans le dispositif de la 1re armée. C'est la décision commune du général de Lattre et du désormais lieutenant-colonel Pommiès. Fer de lance de la division blindée du général Touze de Vigier, le régiment d'infanterie se fait les dents lors des combats de la terrible cote 820 à Servance. Il y est engagé aux côtés du 1er bataillon parachutiste de choc, formé en Algérie, et du 2e régiment de Zouaves.

Du 25 septembre au 30 novembre, 4 500 hommes, dont mon père, sont engagés dans la bataille des Vosges. Successivement, ils attaquent les villages de Ramonchamp (la bataille dure deux mois), Travexin, Le Thillot et enlèvent les hauteurs stratégiques du Drumont.

Dans le sillage du 2e corps d'armée du général de Montsabert, le Corps franc vise la libération de l'Alsace. Les conditions météorologiques sont terribles : grand froid, vent glacial, neige abondante et pluies. Les refuges en rondins ne protègent pas suffisamment et les soldats sont transis, les aliments gelés. Tous s'en souviendront et mon père aura les pieds gelés au 3e degré.




Le 5 février 1945, la campagne s'achève et l'objectif que s'était juré d'atteindre leur chef Pommiès est réalisé : libérer la France.




    


Le Corps franc Pommiès cesse d'exister en tant que composante des FFI et devient le 49e régiment d'infanterie, ancien régiment de Bayonne au passé glorieux, dont  il reprend l'écusson à l'étoile noire. C'est sous cette appellation que le régiment franchit le Rhin à Spire le 3 avril et marche sur Stuttgart. Il dépend de la 3e division d'infanterie algérienne (DIA).



La croix du combattant volontaire est remise au chasseur J.M. Saubadine.





 

 

 

 

 

 

 

 

La prise de Stuttgart

Lorsqu'ils atteignent le Rhin, les soldats reçoivent ce message de leur chef :
"Camarades de combat,

"Nous avons refusé la défaite et ses conséquences,

"Nous avons cru en la France,
"Nous avons lutté, risqué, souffert pour sa liberté,
"Parce que nous l'avons voulu, nous avons combattu sans trêve des Pyrénées à l'Alsace,
"Parce que nous l'avons voulu, nous sommes aujourd'hui au Rhin.
"La cause était juste : dans le clandestin, dans le maquis, dans l'armée, nous l'avons fait triompher.
"Souvenons-nous avec fierté de notre œuvre de soldats".
                                                               P.C Linthal (Haut-Rhin)
                                                               signé : Pommiès

     
Pour la période qui s'étend d'Autun à Stuttgart, les pertes du Corps franc Pommiès s'élèvent à 201 morts et 9 disparus.

Le 12 avril, le 1er bataillon prend ses quartiers à Kleinsachsenheim où est installé le PC du 49e RI. Après Löchgau bombardé la veille, c'est au tour de Kleinsachsenheim de recevoir des salves d'obus meurtrières. Pris sous les tirs d'artillerie, le chasseur Saubadine reste à son poste pour continuer à assurer les liaisons entre les troupes engagées.

 










Ce comportement lui vaut de recevoir une citation à l'ordre du régiment et la croix de guerre avec étoile de bronze.













  


















Il reçoit également la médaille de la libération de l'Allemagne.




 
















Dans la nuit du 20 au 21 avril 1945, la ville de Stuttgart est prise. 
La carte ci-dessous visualise la campagne menée à l'est de la France et en Allemagne par le CFP.



Les photos qui suivent montrent les premiers jours de l'occupation de Stuttgart par la 1re armée, dont la 3e division d'infanterie algérienne, et le défilé du 49e RI devant l'état-major allié.


     




à  gauche : le général de Lattre
de Tassigny, commandant de la 1re armée et vainqueur de la campagne Rhin et Danube.        


                    à droite : le général Guillaume, commandant de la 3e division d'infanterie algérienne.



Etat-major franco-américain : à l'extrême gauche, le général Mark Wayne Clark, commandant la 5e armée US et à sa droite le général de Lattre de Tassigny, commandant la 1re armée française


de g. à d. : les généraux Augustin Guillaume, Mark Wayne Clark,
Jean de Lattre, Jacob Loucks Devers, Joseph de Montsabert

Lieutenant-colonel Pommiès : son PC et sa Lincoln

Le Lieutenant-colonel Pommiès et ses commandants de bataillon

photo de gauche: le général de Lattre salue les drapeaux de la 3e division d'infanterie algérienne. Photo de droite : le général Guillaume passe ses troupes en revue





Défilé sur la Berliner strasse : le  49e RI,


les tirailleurs et l'aviation












Berlin 



Pendant trente-six nuits d'affilée jusqu'au 21 avril au matin, la capitale allemande est soumise à d'intenses bombardements par la RAF. La Chancellerie a été une des cibles privilégiées à l'instar du Reichstag.

Photo du haut : balcon de la Chancellerie d'où Hitler s'adressait à la foule. Photo du bas : les vestiges du Reichstag




Plaque apposée à l'entrée de la Chancellerie du Parti national-socialiste des Travailleurs allemands à Berlin. A l'origine, en 1933, le Parti nazi avait son siège à Munich sous l'autorité de Rudolph Heiss


La ville se rend le 2 mai 1945 : le site de Postdamer Platz (ci-dessous) est aux trois-quarts détruit. Cette place sera littéralement séparée en deux lors de l'édification du mur en 1961

































Prise d'armes pour le 49e RI dans Mullerstrasse dans une forte brume. Le général Koenig est accompagné par le lieutenant-colonel Pommiès. Un mois auparavant, le futur gouverneur militaire de la zone d'occupation française avait procédé à l'arrestation du maréchal Pétain à la frontière suisse et à son enfermement au fort de Montrouge.



Le colonel de Gouvello, commandant de la zone du Palatinat, à Freinsheim : passage en revue.



Les décorations au titre de la guerre 39-45 réunies en barrette.



retour à l'épisode précédent : épisode 1 Exorde

à suivre, épisode 3 : J'habite à Ouargla, territoire des Oasis, dans le Sahara algérien

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Commentaires

  1. Remarquable travail de mémoire, de recherche, de témoignage et une riche iconographie complètent ton livre, déjà très fourni d'un pan immense de ta vie ! Félicitations !!!!

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  2. Les souvenirs sont la pertinence de la mémoire et la mémoire répond aux questions : que s'est-il passé ? comment ? pourquoi ? et moi qu'ai-je accompli ? Avec le filtre de l'affectivité, du doute et de la classification des faits, les événements imposent les situations et provoquent les opportunités. Les documents, les photos, les témoignages appartiennent à l'héritage patrimonial et leurs recensement, compilation et ordonnancement relèvent du legs. Il convient de conserver la mémoire familiale qui dit ce que l'on est et d'y associer ce que l'on est devenu.

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    1. En espérant que les générations futures s'intéressent également à leur héritage culturel et affectif tout en conservant leur liberté de se créer.

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